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04/08/2017

RÉVOLUTION ET MOUVEMENT SOCIAL

Alarme N°12 Juin 1981

Lorsqu'on se réclame du socialisme scientifique, cela implique qu'on doit à partir de la situation objective présente, déduire les tâches révolutionnaires concrètes du prolétariat
 Or examinions cette situation objective, nous remarquons que le capitalisme n’a plus aucune raison d'être, qu’il est totalement réactionnaire ; en effet pour les révolutionnaires, le seul critère de progrès d'une société d'exploitation de l'homme par l’homme, ne peut être que la construction des conditions objectives permettant son dépassement révolutionnaire, et la construction rapide d'une société progressive. C'est à dire qu'une telle société n’est progressive que lorsqu’elle construit ces conditions objectives, mais existant encore une fois ces conditions crées, elle devient réactionnaire. Dans le cas qui nous intéresse: le capitalisme, les conditions objectives sont donc, un monde unit par les rapports capitalistes dans lequel le prolétariat est une force internationale potentiellement puissante et capable de détruire le capitalisme; et des forces productives suffisamment développées, le monde est unit depuis le début du siècle, et le prolétariat a prouvé sa capacité à abattre le capitalisme et à construire le communisme, par la vague révolutionnaire de 1917-1937. Les conditions objectives sont présentes depuis le début du siècle, et donc depuis lors ce système est en décadence.

Sur cette base le prolétariat a des tâches précises à réaliser, l'économie capitaliste étant totalement réactionnaire, le capitalisme en tant que système social étant totalement caduc, la révolution, est maintenant seule à l'ordre du jour, devra directement s'attaquer aux bases économiques de ce système. Or ne pas donner les tâches concrètes du prolétariat à notre époque, parlé de révolution et de généralisation des luttes, ne suffit pas.

Le communisme ne tombe pas du ciel, le mouvement qui y mènera, devra passer sur le corps de tous les problèmes que rencontre le prolétariat face au capitalisme. Il devra donc saisir toutes les données, toutes les possibilités de la situation objective, et les exploiter à fond. Il en découle des tâches de notre époque. Alors ou est le matérialisme si l'on s'arrête à la généralisation des luttes, élections des délégués (hors du syndicat bien sur) révocables à tout instant...Si au lieu de se battre pour donner un contenu de classe aux luttes, avec des tâches précises à réaliser, on se concentre sur les formes de luttes.

Les socialistes utopiques n'étalent pas utopiques parce qu’ils imaginaient une société qui ne correspondait pas au communisme, ils étaient utopiques car leurs idées n'étaient pas basées sur la réalité objective. Ne cherchant pas à savoir quelle est la force capable de renverser le capitalisme et de construire une société humaine, ils pouvaient encore moins élaborer des tâches basées sur la réalité concrète, que cette force aurait dût faire sienne. Autrement dit, aujourd’hui, il ne suffit pas pour être matérialiste de lutter pour une société qui soit celle pour laquelle ont lutté les premiers socialistes scientifiques, il faut lutter pour des réalisations concrète du prolétariat en lutte, et qui de plus ne soient pas en deçà, mais correspondent aux possibilités et nécessités que le capitalisme à fait mûrir.

Non, il ne s'agit pas d'affirmer que c'est le prolétariat qui trouvera lui même ses revendications, et que de proposer et de se battre pour des revendications précises serait, de la part des révolutionnaires, vouloir enfermer le mouvement dans un schéma (n’y aurait-il pas alors pas schéma dans: "conseils ouvriers" ou "délégués révocables à tout instant" et dans ce cas pour éviter les schémas: attendre et se taire, mais alors à quoi ça sert d'être révolutionnaire.)

En effet, si nous sommes d'accord sur le fait que les révolutionnaires font partie du prolétariat, il faut alors considérer toutes les implications de cette affirmation. En tant que frange la plus consciente du prolétariat, les révolutionnaires sont conscients non seulement de l'objectif à atteindre, mais aussi des moyens qui y mènent, c'est à dire du mouvement que prendra sa pleine amplitude n'aura la puissance nécessaire qu'avec les revendications correspondant aux possibilités historiques. D'où l'importance des révolutionnaires dans la luttes pour impulsée un combat pour les tâches de notre époque. Ceux qui parlent de mouvement sans parler des réalisations concrètes que le mouvement révolutionnaire devra effectuer, au risque de se détruire en tant que mouvement révolutionnaire, limitent leur intervention à un slogan "Abolition du salariat", vidé en grande partie de son contenu.

Ouvrons ici une parenthèse.

Sur les tâches de notre époque apportons de plus quelques précisions. Si la conscience révolutionnaire n'apparait pas brusquement comme conscience révolutionnaire nette dans la majorité de la classe, nous rejetons aussi tout gradualisme dans la formation de cette conscience car, l'accumulation et la centralisation élargie du capital redoublent, proportionnellement à elles mêmes, la dépendance matérielle et culturelle du prolétariat. Et de ce fait, la conscience révolutionnaire se développera, progressera par bond, à de larges franges de la classe, que lorsque le prolétariat en mouvement s'attaquera à cette accumulation, pour en finir avec elle. Et c'est donc dans cette optique, qu'il faut comprendre les tâches de notre époque; et non pas comme un gradualisme qui permettrait une formation "scientifique de la conscience". En effet si nous rejetons le gradualisme dans la formation de cette dernière, nous rejetons aussi la formation “scientifique" de la conscience. Car sinon le facteur subjectif, sans lequel jamais le prolétariat ne pourrait s'affirmer en fait, serait réduit au néant au profit du seul facteur objectif, nécessaire mais non suffisant. En effet, nous nous réclamons du socialisme scientifique, et donc nous savons que le moteur de l'histoire est la lutte de classe; en conséquence, nous ne pouvons que rejeter une formation "scientifique" de la conscience car la dernière classe de l'histoire, en développant radicalement cette lutte, deviendra sujet de l'histoire; et donc sa conscience loin d'être le résultat d'une réaction chimique inéluctable, se développera sur les ailes de la subjectivité révolutionnaire.

Refermons ici cette parenthèse.

Pire si loin de spécifier les tâches révolutionnaires concrètes de la classe, sont repoussées catégoriquement les tâches liées au fait que les conditions objectives sont mures. "Et donc que le capitalisme en tant que système social économique, et pas seulement politique, n'a plus aucune raison d'être. Et cela sous le prétexte que le communisme n'est pas possible dans un seul pays" Bien sur, que cette phrase est vraie, elle veut dire que le communisme ne sera réalisé que lorsque les classes auront été détruites, que lorsque l'exploitation de l'homme par l'homme aura disparue et donc que lorsque les unités d'exploitation que sont les nations auront été détruites. Et cela parce qu’aujourd’hui communisme et capitalises sont, des systèmes totalement antagoniques qui ne peuvent donc pleinement se réaliser, qu'en ayant radicalement détruit le système opposé.

Ceci étant dit, ce sera un mouvement, et pas un décret qui fera passer la société de l'état capitaliste, à l'état d'équilibre stable: le communisme. Ce mouvement passera par des états totalement instables; "Dans aucune révolution on ne peut observer «le juste milieu", car sa loi naturelle exige une décision rapide « de deux choses l'une: ou bien la locomotive escalade la côte historique à toute vapeur, ou bien, entraînée par son propre poids, elle redescend la pente jusqu'au point d'où elle était partie entraînant avec elle dans l'abime tous ceux qui tenteraient, à l'aide de leurs faibles forces, de la retenir à mi chemin. (Rosa Luxembourg, dans «la révolution russe").

Cette côte historique sera escaladée à toute vapeur, que si le prolétariat lutte pour des revendications qui correspondent exactement aux possibilités et nécessités historiques. Les états instables seront caractérisés par l'irruption violente, du prolétariat, dans tous les domaines: social et politique, qui tentera de réorganiser la société suivant ses intérêts. Par exemple, pour la révolution Russe, pour reprendre les termes de la citation, la locomotive s'écrasa en 1921 avec l'introduction de la N.E.P. qui libéra les relations marchandes et remis au premier plan la plus-value. Les états instables qui précéderont cette chute, furent par exemple: communisme de guerre, qui bien que cette révolution prolétarienne ne fut que politique, et non pas sociale, contenait à l'état de germe l'attaque de la plus-value, dans la mesure où cette dernier avait perdu son rôle prépondérant en faveur des rémunérations ouvrières. 

Et pour conclure sur ce dernier sujet: Sous prétexte de ne pas faire le communisme dans un seul pays, il ne s'agit pas de conserver le capitalisme dans tous les pays. Construire le communisme dans une seule nation est une impossibilité, car la nation n'existe qu'en tant qu'unité d'exploitation. Détruire le capitalisme, c'est à dire, sans attendre la révolution politique internationale, s'attaquer partout à son système nerveux: la plus-value, s'attaquer au sur travail social avec l'objectif de se le réapproprier (Voir dans "Pour un second manifeste communiste", les tâches de notre époque: "Toute augmentation de la production sa valeur actuellement) qu'elle provienne d'un plus grand rendement de l'ouvrier ou d'un perfectionnement technique, doit revenir collectivement aux ouvriers qui en sont les auteurs, en attendant que la classe toute entière décide de sa répartition, ...), et donc de le faire disparaître en tant que sur-travail social, est une nécessité historique.

En conséquence, le lieu où éclatera la révolution sociale ne sera pas un pays communiste parmi d'autre pays, capitalistes eux.

Ce sera l'endroit ou auront été déracinées les bases du capitalisme, et ou auront surgit les bases de la production et de la distribution communiste, entouré-- par les nations capitalistes, unies contre la révolution .Ce sera le lieu qui, ou bien s'étendra aux principaux pôles industriels, et de là au monde entier, ou restant isolé par manque de solidarité internationale sera détruit d'une manière ou d'une autre. Prétendre qu'aucune mesure économique socialiste, ne peut être appliquée dans un cadre réduit, c'est ne pas avoir compris que le pouvoir ouvrier n'est pas qu'une simple forme, nais qu'il est essentiellement un contenu. C’est ne pas avoir compris que le prolétariat ne se mobilise pas en premier lieu pour prendre le pouvoir, mais pour lutter contre sa situation d'exploité; et que ce pouvoir, il en a besoin pour en finir avec elle c'est un moyen, et non un but. Si l'on affirme que le prolétariat, par la révolution, s'affirme en tant que sujet de l'histoire, c'est à dire d'une manière consciente, on affirme par là même que ce dernier va combattre tous les rapports de la société qui  l’exploite. Sans quoi il restera objet soumis à l'exploitation qui ne peut être qu'extérieure à lui, il ne serait qu'un sujet décapité et donc facilement malléable. Car n'oublions pas que ce sont les rapports de production, qui déterminent les relations sociales, et non l'inverse.

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Il n’était pas d’usage au sein du F.O.R de signer les articles d’ALARME ni ceux de la revue L’ARME DE LA CRITIQUE, l’usage sera donc respecté. Pour ceux et celles qui ont été familiarisées avec les textes du F.O.R il sera facile d’en reconnaître l’auteur tant par le style que sur le fond.